…[lorsque Dominique Torrente demande aux modèles de ses récentes photographies – montrées ici pour la première fois- de porter les canevas brodés, et que ceux-ci s’approprient ces pièces de tissu comme des « peaux » quasi animales vêtements colorés que seuls leurs corps architecturent, elles leur redonnent vie et parfois aussi, découvrent l’envers du paysage, du décor, de la belle broderie : les fils emmêlés et les nœuds. « Ce dernier côté est moins beau », dirait Schopenhauer, « mais plus instructif, car il permet de reconnaître l’enchainement des fils »¹, autrement dit, comment s’est construite la peau du paysage. Si Schopenhauer compare la vie à une étoffe brodée dont « chacun ne verrait, dans la première moitié de son existence, que l’endroit, et, dans la seconde, que l’envers »¹, c’est probablement davantage l’intérêt et la curiosité pour la forme du travail, de la transformation par l’assemblage de l’épars en un tout constitué, qui nourrissent les recherches de Dominique Torrente. Car l’espace de la toile brodée, endroit comme envers, forme un territoire – un paysage- complexe, au sens premier, étymologique. Elle est un tout complexe c’est-à-dire un « assemblage » de constituants « tissés ensemble », un « enchevêtrement d’enlacements »², pour reprendre l’expression d’Edgar Morin.]…
Marie Deparis Yafil, commissaire d’exposition, historienne. 2019
¹ Arthur Schopenhauer- Aphorismes sur la sagesse dans la vie – Chapitre VI : « De la différence des âges de la vie ».
Dimensions : 210x180cm
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