Dimensions : 800 cm x 600 cm environ
Vues de l’installation de Marie-Noëlle Deverre pour l’exposition Métamorphoses et Débordements à Maison des Arts Solange-Baudoux, Evreux, 2021
Exposition personnelle en duo avec la plasticienne Frédérique Fleury.
Métamorphoses et Débordements
[…] Cheminer dans une installation de Marie-Noëlle Deverre est être clairement invité comme variable d’une équation.
«Ainsi par une lente déambulation rêveuse on pourrait devenir l’œuvre que l’on regarde», nous dit-elle. Un espace utopique et anachronique naît de notre rencontre avec l’installation qui s’ouvre à toutes les profondeurs, à toutes les directions.
On y découvre des enveloppes tissées d’une métamorphose émergente, des mues, écrins de présences d’absence, des sculptures « portables » pour se ravir à soi-même en se racontant des histoires, faisant ressurgir des phantasmes d’enfance et ses ritournelles.
Des objets à « l’inquiétante étrangeté » appellent des lointains, dans le temps ou l’espace, où chaque chose est toujours «autre chose».
Toutes ces formes dissimulent en apparaissant. Elles ont pris leur indépendance et sont devenues en quelque sorte sauvages.
«Sachez que je suis en train de vous cacher quelque chose» 1
Tel que vous me voyez, je suis en train … érotique d’entrevoir pour intensifier notre présence au monde, nous pousser en avant de nous-mêmes.
Marie-Noëlle Deverre produit ses linogravures dans cette même fluidité. Destructurées en fragments d’un tout invisible, elles « jouent avec leurs parts manquantes » pour devenir une installation évolutive, comme celle intitulée Les restes du jour. La poésie naît de cette attention aux restes, aux rebuts :
«…ne suffit-il pas pour cela d’élaborer le défaut, de donner forme au reste, de faire du « reste meurtri » un authentique reste construit ? 2
L’installation est remodelée à chaque nouveau lieu, mais en la laissant libre de remonter à contre courant vers sa mystérieuse origine, moment formel de toutes les métamorphoses.
Radiographiée comme un corps humain, une dentelle ornant un coin de mouchoir est reproduite dans ces gravures, puis morcelée au sein de marées de couleurs débordantes qui fusionnent les plans et, dans une joie baroque et insolente, nous offrent un contact direct avec l’œuvre. L’imprévisible crée l’évènement. Là encore, le beau est produit par « la part de l’événement que son accomplissement ne peut réaliser » 3
Ce petit coin de mouchoir, ressor de la gravure, est invisible, comme « l’ombre d’un arbre absent » 4, il est le fruit de rencontres lors d’une résidence. Son art d’ailleurs se bouleverse de ces rencontres inaugurales. Dans le même esprit, des performances découlent naturellement de ce travail, ouvert et rayonnant de « vérités pour nos pieds, qui se puissent danser ». 5
1- Roland Barthes, Fragments d’un discours amoureux
2- Georges Didi-Huberman, Ce que nous voyons, ce qui nous regarde
3 – Maurice Blanchot, L’espace littéraire
4 – Bernard Noël, La moitié du geste
5 – Friedrich Nietzsche
Texte de l’auteur Christian Zimmermann à propos de l’installation de Marie-Noëlle Deverre dans cette exposition.
Photos © Vincent Connétable
Extrait vidéo sur l’exposition :
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